Le 60ème Festival International du Film de Thessalonique vient de s’achever avec panache, ce dimanche 10 octobre.

© Ververidis Vassilis – Motion Team

Plébiscité par des dizaines de milliers de spectateurs, l’événement aura offert dix jours de voyage, parfois d’exil, dix jours d’histoires polyphoniques en provenance de tous les continents. Les comédies légères auront succédé à des chants plus graves, à des questions de justice sociale ou de respect de la nature. Pendant dix jours, sur le front de mer, les docks réhabilités, les salles de cinéma disséminées dans la ville, les théâtres et les cafés ont accueilli un public avide de discussions, de masterclasses, de séminaires ou d’expositions.
Côté professionnel, l’Agora, où se sont joués les destins de jeunes films en tournage ou en post-production, l’Institut du Film Méditerranéen, l’Académie Locarno-Thessalonique, ont vu passer le meilleur du cinéma grec et européen dont ils ont pu encourager le développement par des rencontres et des dotations.

John Waters © Ververidis Vassilis – Motion Team

L’avant-dernier jour du festival, le dandy John Waters et son col bleu à pois blancs ont reçu un Alexandre d’or honorifique pour sa contribution au cinéma. Mais décerner les autre Alexandre constituait un défi de taille : il s’agissait de trancher entre des dizaines de réalisateurs, de films et d’acteurs, comme entre des poèmes envoyés depuis le monde entier.
Jacqui Davies, productrice anglaise, Ariane Labed, actrice française, Angeliki Papoulia, actrice grecque, Rugilė Barzdžiukaitė, réalisateur lituanien, et Wieland Speck, réalisateur allemand, composaient cette année le jury international du Festival, chargé de la lourde tâche. C’est dans le cinéma Olympion, vêtu de velours rouge, qu’ils ont décerné leur palmarès. Trois films, qui ont en commun de plaider pour plus d’humanisme et de respect envers la Terre et ses peuples, contre la voracité des puissants et leur force destructrice, ont été tout particulièrement reconnus.

Viendra le feu © Miramemira – 4 A 4 Productions

On se réjouit de l’Alexandre d’Or du meilleur film, attribué au superbe Viendra le feu, d’Oliver Laxe (Espagne, France, Luxembourg), dont l’acteur lumineux, Amador Arias Mon, reçoit aussi le Prix d’interprétation masculine pour sa prestation retenue et mystérieuse dans une Espagne de hameaux montagnards.

La Fièvre © Still Moving

La Mention spéciale du Jury récompense d’un Alexandre d’argent La Fièvre, de Maya Da-Rin (Brésil, France, Allemagne), tourné dans la touffeur amazonienne de Manaus, dans lequel Justino, Amérindien natif du peuple Desana, est pris d’une fièvre étrange.

Canción sin nombre © La Vida Misma Films

Le Prix de la meilleure mise en scène échoit à Canción sin nombre, élégant film péruvien en noir et blanc, réalisé par Melina León, portant sur le scandale des vols organisés de nouveaux-nés d’origine Quechua, dans les années 90.

La Hija de un ladrón – © Oberon Cinematográfica – Bteam Prods

Sa performance naturaliste vaut à l’Espagnole Greta Fernández de recevoir le Prix d’interprétation féminine, pour ce beau visage grave qu’a amoureusement saisi la caméra de La Hija de un ladrón, de Belén Funes (Espagne).

Sortilège (Tlamess) © Potemkine Films

Dans la section Meet the Neighbors , récompensant un premier ou un deuxième film issu d’Europe de l’Est, du Sud-est ou du Moyen-Orient, un Alexandre d’or est décerné à Sortilège (Tlamess) d’Ala Eddine Slim (Tunisie, France).

Siege on Liperti Street – © Argonauts Productions

Siege on Liperti Street (Grèce, Chypre) est récompensé d’un Prix du public (section cinéma grec), de celui de la Fédération panhellénique des critiques, des prix ERT et FIPRESCI, forçant son actrice principale, Daphné Alexander, à se présenter quatre fois sur la scène et à redoubler d’imagination pour présenter ses remerciements au nom du réalisateur, Stavros Pamballis.

Daphné Alexander – © Dimitra Merziemekidou – Motion Team

Trois autres Prix du public sont remis à :

- Defunct, de Zacharias Mavroeidis (Grèce), en compétition internationale,
- What a country ! de Vinko Bresan (Croatie, Serbie, Pologne) dans la section « Balkan Survey »,
- Les Hirondelles de Kaboul, de Zabou Breitman et Éléa Gobbé-Mévellec (France), dans la section « Open Horizons ».

Les Hirondelles de Kaboul – © Les Armateurs

Le Prix Réalité virtuelle revient à Isobel Knowles et à Van Sowerwine pour leur film Passenger (Australie) et une mention spéciale de la même section à Family Portraits, de Maria Mavropoulou (Grèce).

Le Prix Mermaid, saluant le traitement de thèmes LGBTQI, est décerné au film Moffie (Afrique du sud, Royaume-Uni), et une mention spéciale de ce prix revient à Canción sin nombre.

La Fédération Internationale des Critiques de Cinéma et la chaîne du Parlement Hellénique décernent leurs prix à Beware of children, de Dag Johan Haugerud (Norvège, Suède).

En matière de cinéma grec diversement primé cette année, on retiendra aussi les films Defunct de Zacharias Mavroeidis, Perséphone de Costas Athousakis, Entwined de Minos Nikolakakis, Not to be unpleasant but we need to have a serious talk de Georgos Georgopoulos, Cosmic Candy de Rinio Dragasaki, et enfin The Miracle of the Sargasso Sea de Syllas Tzoumerkas.

On peine à croire que la remise des prix s’est achevée, signant la fin du festival. Dans l’Olympion, qui a chaleureusement applaudi, les yeux clignent, on se redresse sur son siège. Fini, le festival, vraiment ? Non, pas tout à fait. On diffuse en clôture le loufoque Jojo Rabbit, comédie de Taika Waititi pas si loufoque qu’elle n’en a l’air, récompensée cette année par le Prix du public à Toronto. Ouf, deux heures de cinéma à vivre encore, suivies d’une soirée qui pourrait bien se prolonger jusqu’à l’aube…

Critiques et interviews à suivre…

© Fanny VAURY

Festival International du Film de Thessalonique du 30 octobre au 10 novembre 2019


Un article publié sur À Voir – À Lire.com, visible ici.